Devant l’impossibilité de nous rendre à Madagascar pour le moment, nous avons multiplié les contacts pour pouvoir vous donner des nouvelles de nos écoles. Nous avons ainsi reçu un rapport mensuel plutôt que trimestriel. Et nous avons innové fin juillet par une rencontre Whatsapp. Pour y assister, les religieuses se sont rendues à l’évêché, à Morondava, afin d’avoir la possibilité de se connecter. Ce fut une belle expérience malgré les nombreuses interruptions dues à l’instabilité de la connexion et aux coupures de courant. Néanmoins, nous avons décidé de tenter de nous joindre ainsi une fois par mois, tant que nous ne pourrons pas aller sur place et peut-être même plus tard ! On verra.
Nouvelles des écoles primaires.
Les cours ont repris le 3 mai, après le 3° confinement. Malheureusement, beaucoup d’abandons ! Les parents rechignent à envoyer leurs enfants à l’école pour le 3° trimestre car c’est, entre autre, le temps de la moisson et les enfants sont une main d’œuvre gratuite et bien utile !
Les enseignants espèrent revoir ces élèves à la rentrée de septembre. A chaque réunion de parents, les directrices tentent de motiver les parents pour qu’ils permettent à leurs enfants de terminer l’année scolaire sans trop d’absence !
Nous devons malheureusement constater que les statistiques de l’UNICEF, reçues en 2011, se vérifient. Elles mettaient en avant le manque de motivation des parents, des enfants et des services publics à garantir l’éducation pour tous, prévue par la convention des droits de l’enfant.
Le désir d’ouverture d’une école dans les villages de Tandila et d’Andrénalafotsy était tel que nous avions pensé à une description bien pessimiste de la part de l’UNICEF. Nous sommes dans la région du Menabe, une des régions les plus ‘ancrées’ dans les traditions et une des régions les moins bien desservies par l’aide humanitaire ( voir carte ci-dessous). Il nous faut donc être patients, maintenir notre soutien moral et financier, et nous réjouir des avancées par rapport à il y a 10 ans.
Explication des statistiques de l’Unicef
Pour avoir une idée plus juste de la situation, les statistiques de l’UNICEF ont été mise à jour en 2018. Voici quelques données :
- un enfant âgé de 6 à 10 ans sur cinq et un enfant âgé de 11 à 14 ans sur trois ne sont pas scolarisés.
- un enfant âgé de 5 à 17 ans sur deux est déjà engagé dans un travail quelconque.
Précisons encore un peu car les disparités sont grandes :
- Au niveau national, 76% des enfants sont scolarisés à l’école primaire et 56% la terminent.
- Dans le Menabe, ces chiffres ne reflètent pas la réalité : 61% commencent l’école primaire et 37% la terminent.
- Au niveau national, 27% des jeunes commencent le collège (1er cycle des secondaires) et 26% achèvent ce cycle.
- Dans le Menabe, 16 % commencent et 15% terminent.
- Quant au second cycle des secondaires, au niveau national, 13% commencent le lycée et 15% le terminent.
- Dans le Menabe, 6% commencent le lycée et 13% le terminent.
Il faut noter aussi que la disparité existe non seulement entre les régions, mais aussi au sein d’une même région entre les enfants et les jeunes des villes et ceux de la brousse. Et parmi ces derniers, ceux dont les parents sont aisés (car étant propriétaires de zébus ou de terre cultivables et non inondables) sont encore privilégiés.
Rien n’est simple à Madagascar !
Si nous nous référons à ces statistiques nous pouvons être heureux du taux de réussite dans nos écoles et devons axer les efforts sur la stabilité et la persévérance ! C’est un des objectifs de nos enseignants. Ils savent et acceptent que pour Madaquatre l’école ne peut être une garderie pour les plus jeunes (qui ne peuvent pas encore être une main d’œuvre efficace pour les parents) et que dès lors notre désir est de privilégier les classes de 9°, 8° et 7° afin que le plus d’enfants possible terminent au moins l’école primaire. (Pour rappel, il s’agit du système français)
L’évolution va doucement dans ce sens et nous pouvons dès lors être optimiste même si le nombre d’enfants en maternelle est toujours énorme par rapport au nombre d’enfants sortant du primaire.
Rapports de fin d’année scolaire 2020-2021
En cette fin d’année scolaire 2020-2021, nous avons reçu les rapports, comptes, budgets et autres documents pour les écoles primaires, le collège et les lycéens. Malgré les circonstances difficiles d’apprentissage, les résultats sont meilleurs que l’an dernier et l’avenir est donc prometteur.
Il y a cependant eu beaucoup d’abandons suite aux différents confinements, 86 sur un total de 473 élèves !
Au niveau des écoles primaires, sur les 375 élèves inscrits, seulement 310 ont passé les examens et 231 ont été admis en classe supérieure.
La toute bonne nouvelle cependant vient des élèves sortant de 7° : 24 élèves sur 25 ont réussi l’examen d’état et peuvent donc, potentiellement, passer au collège ! Bravo à eux !
Au niveau des cantines scolaires, tout se passe pour le mieux. La sécurité alimentaire est toujours un attrait pour les parents et enfants. C’est la plus grosse part de notre budget mais c’est incontestablement une nécessité dans ce pays où nombre d’enfants ne mangent pas à leur faim.
Au niveau des enseignants, quelques changements importants pour la rentrée scolaire du 15 septembre 2021, tant à Tandila qu’à Andrénalafotsy. En effet, Sr Jeannette a été désignée pour assister sr Clémentine en tant que directrice- adjointe au même titre que sr Martine. La direction des 3 écoles sera dès lors assurée par une religieuse. Nous espérions cela depuis le début, les religieuses étant mieux formées dès le départ
Madame Victoire, anciennement directrice adjointe, n’est plus à même d’occuper ce poste suite à la tuberculose. Elle a retrouvé plus ou moins la santé et sera l’institutrice des 7° de Tandila et d’Andrénalafotsy. Les élèves de 7° continueront à être regroupés à Tandila leur nombre étant de 25 élèves au total.
Autre nouveauté d’importance : une classe d’alphabétisation va voir le jour. En effet, quelques familles ayant des enfants qui n’ont pas été scolarisés en temps voulu, ont demandé à ce que leur enfant puisse apprendre à lire et à écrire. Cette demande montre bien l’évolution positive de la mentalité et nous y répondrons dès lors volontiers.
Madame Huguette est enceinte et un(e) remplaçant(e) sera dès lors engagé(e) pour la période de son congé de maternité. C’est cette personne qui commencera la classe d’alphabétisation après le retour de Madame Huguette, soit au second trimestre.
La rentrée scolaire 2021-2022 est prévue le 15 septembre 2021
Les difficultés rencontrées dans la gestion des écoles primaires
Il y a une cinquantaine d‘élèves non déclarés qui n’ont pas d’acte de naissance. Document indispensable pour pouvoir passer les examens. Les parents ne feront pas les démarches. La solution envisagée et mise en place : Le juge du district, habilité à établir ces actes de naissance rétrospectivement, va venir à Tandila avec des témoins. Toutes les personnes nécessaires seront ainsi réunies: parents, témoins et juge et les enfants auront la possibilité de passer les examens.
Concernant les urinoirs et WC, il y a deux problèmes:
Dans la mentalité de cette région, tout ce qui est en rapport avec les excréments est tabou. Ils font leurs besoins à ciel ouvert et il est très difficile de leur faire entendre les choses à ce sujet. Cela évolue tout doucement et les élèves commencent à accepter. Mais, comme il n’y a pas d’eau (second problème) cela sent très mauvais et du coup ils ne veulent plus y aller.
La question sous-jacente concerne l’entretien des wc. Lorsqu’un wc est plein, il faut creuser un trou plus loin et y transvaser les excréments. Il est évident que cela se fait ainsi dans plein de régions (et dans d’autres pays) mais personne n’accepte de le faire dans la région des écoles. Il faut donc faire venir quelqu’un d’une autre région. Un ‘videur de latrines’. Mais ce n’est pas encore d’actualité. Le problème actuel c’est le manque d’eau et donc les odeurs.
La solution qui pourrait être envisagée est la construction d’un château d’eau avec un grand réservoir et une canalisation jusqu’aux abords des wc mais … cela pose un autre problème : est-il juste d’employer l’eau, si rare, pour des wc alors que la population doit faire plusieurs km avec des seaux d’eau sur la tête pour leur consommation personnelle ? Cette solution mérite vraiment réflexion au-delà du coût !